Crée le 13-07-2012-12h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE. Mis à jour le vendredi 13-07-2012 - 12h05 PAR : L'AVENIR
Aubin Minaku, président de l'Assemblée nationale de la Rd Congo participe à la XXXVIIIe session de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie qui se termine aujourd'hui le 12 juillet 2012 à Bruxelles, en Belgique, sous la présidence de M. Roch Marc Christian Kabore, président de l'Assemblée nationale du Burkina Faso et président de l'Assemblée parlementaire de la Francophonie, à l'invitation de Michel de Lamotte. Le thème du débat général est : « Médias et technologies de l'information et de la communication, vecteurs de la Francophonie dans le monde ». C'est à cette occasion que la consœur Colette Breackman a rencontré le président Aubin Minaku et nous propose ce reportage :
A l'occasion de la réunion de l'Assemblée des parlementaires francophones, Aubin Minaku, le président de l'Assemblée nationale congolaise, est formel : « aucune délégation n'a émis la moindre objection quant à la tenue du sommet de la francophonie à Kinshasa. Quant à la participation belge, nous avons constaté son implication, notamment par rapport à la situation à l'Est, et même si nous savons que les élections communales se tiendront le 14 octobre, nous avons la garantie du fait qu'une solution acceptable sera trouvée. »
M. Minaku reconnaît qu'en France comme en Belgique, des questions ont été posées par rapport au processus électoral et du respect des droits de l'homme et il assure : »nous sommes dans un schéma transparent pour ce qui concerne les élections. Avant de venir j'avais organisé à l'Assemblée nationale deux journées de débat sur le processus électoral. Il y a eu un échange franc entre les députés de l'opposition et même de la majorité et le pasteur Mulunda, président de la Commission nationale indépendante, qui était présent. A l'issue de cet échange nous avons adopté plusieurs recommandations, la première portant sur la nécessité de réviser la loi électorale, entre autres pour ce qui concerne la composition du bureau de la CENI. En septembre, lorsque nous reprendrons nos travaux, la première loi que nous allons adopter portera sur le fonctionnement de la CENI. Tout le reste, et donc le destin du pasteur Mulunda, en découlera…Il n'y aura pas de débat sur les personnes, mais nous allons revisiter la loi, ce qui correspond aux attentes de nos partenaires. L'autre priorité sera la mise en place de la Commission nationale des droits de l'homme. Il faut bien savoir que ce n'est pas en deux élections que le Congo peut devenir une vieille démocratie, cela prendra du temps et nous aurons besoin de vos conseils avisés…
N'oubliez pas que d'autres, des voisins, sont bien en deçà de nous : le Tshisekedi du Rwanda (ndlr. l'opposante Victoire Ingabire qui avait voulu se présenter aux dernières élections présidentielles) a été arrêtée en début de campagne électorale et jusqu'à ce jour, elle est en prison ! » Aubin Minaku insiste pour que l'on « donne du temps au Congo » et ne nie pas le fait que les élections locales et provinciales seront probablement retardées. « Nous allons aussi examiner la loi sur les conditions d'éligibilité, sur le fonctionnement des partis, ces derniers sont sans doute trop nombreux… Chez moi dans le Bandundu, il y avait 345 candidats pour sept postes à pourvoir, c'est un problème…
Si la priorité, c'est la loi sur le fonctionnement de la CENI, c'est parce que nous voulons bien organiser les élections locales et provinciales, car leur succès crédibilisera les élections précédentes, celles du 28 novembre 2011. La première victime des désordres qui ont eu lieu alors, c'est Joseph Kabila… Je me souviens qu'à Idiofa, dans certains villages, des centaines de personnes me disaient qu'elles souhaitaient voter pour Kabila mais… elles n'avaient pas de bulletins de vote…Je suis sûr que des élections transparentes, que la présence d'observateurs internationaux, nous donneront à peu près la même configuration politique qu'aujourd'hui, la même majorité au niveau provincial…
Il y aura cependant un petit retard. Les élections de 2011 ont du être organisées en moins de huit mois car nous étions rivés à cette date du 6 décembre qu'il ne fallait pas dépasser et tout le monde refusait de découpler les scrutins présidentiel et législatif. Si nous voulons organiser des élections crédibles, il faudra que nous ayons un peu de temps…En outre, il faudra que les élections se fassent pendant la saison sèche, les conditions seront meilleures… » Alors que le ministre Reynders a exprimé à plusieurs reprises sa « vive préoccupation » à propos de la situation dans l'Est, le président de l'Assemblée nationale se dit très satisfait de l'attitude de la Belgique « le contact diplomatique démontre qu'il y a une pression conjuguée sur le Rwanda, et la Belgique joue un rôle important à cet égard, à tous les niveaux, dont l'Union européenne. Les attentes du Congo trouvent une réponse positive, la Belgique a agi comme nous l'espérions, y compris auprès de certains membres permanents du Conseil de Sécurité. Il faut dire que le temps joue en notre faveur, car avec le temps la mauvaise conscience de l'Occident par rapport au Rwanda s'atténue.
En 1999 encore, on reconnaissait prudemment que des « troupes étrangères non invitées » se trouvaient sur le territoire du Congo, la formulation était réellement laborieuse. Aujourd'hui la charge de la preuve a changé de camp, c'est le Rwanda qui se trouve sur la défensive… Aujourd'hui il faudrait que le Conseil de Sécurité demande officiellement au Rwanda de retirer ses troupes. Mais nous aussi nous devons mieux organiser notre armée et gérer ensemble la situation économique régionale dans le cadre de la Conférence des pays des Grands Lacs. » Sans mâcher ses mots, Aubin Minaku estime que derrière les forces rwandaises qui interviennent au Kivu se trouvent « des individus qui sont considérés comme tremplins par des milieux d'affaires extérieurs, afin d'exploiter les richesses du Congo. Je n'incrimine pas le citoyen moyen, le peuple rwandais en tant que tel… »
Les incidents anti-tutsi de Goma (les motards ont manifesté, réclamé des armes…) inquiètent le responsable politique : « nous avons de fortes raisons de penser qu'il y a eu manipulation de la part du Rwanda, qui cherche toujours un prétexte pour intervenir, en assurant que les Tutsis seraient menacés. Il ne faut pas que des populations congolaises, peu instruites, tombent dans le piège de la stigmatisation de certains groupes. C'est vraiment un gros piège et nous ne devons pas y tomber…A part le souci opérationnel de la guerre, c'est notre principale préoccupation. Je tiens aussi à dire que parmi les soldats qui se sont battus pour défendre le Congo, leur patrie, il y a des Tutsis Banyamulenge qui sont sur le front et résistent…Ils ont refusé d'être manipulés par des étrangers. Nous ne voulons pas donner au Rwanda l'occasion de réveiller à nouveau la crainte et les souvenirs du génocide, le piège est trop gros et nous n'allons pas y tomber… »
Décryptant la formulation du président Kabila, qui estime que le Congo est victime d'une « conjuration », Aubin Minaku se veut plus direct : « à l'Assemblée nous avons débattu de cela à huis clos, mais nos services ont réuni et exposé les preuves évidentes que nous détenions, impliquant le rôle du Rwanda… C'est clair : les avions qui atterrissent dans nos forêts et qui repartent chargés de coltan se posent au Rwanda, d'où ces cargaisons repartent. Il y a des milieux étrangers privés, je dis bien privés, des milieux d'affaires étrangers qui utilisent certaines personnalités rwandaises et des complices congolais, même au sein des élus. Lorsqu'un élu se voit remettre 500.000 dollars grâce au commerce illicite du coltan, il ne va pas servir les intérêts supérieurs de la République mais participer à un réseau mafieux dans lequel se retrouvent des politiques, des militaires et même des membres de la Monusco…Le réseau passe par le Rwanda et sert des milieux privés, dont les ramifications s'étendent même jusqu'en Chine. Le Congo a été tellement déstructuré qu'il lui est bien difficile de se défendre, de poser des actes de souveraineté. Et lorsqu'il le fait, la guerre reprend…C'est là le véritable enjeu. »
L'Avenir
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