Crée le 16-07-2012-13h00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE. Mis à jour le lundi 16-07-2012 - 22h05 PAR : CONGO NOUVEAU
Albert Rudatsimburwa, directeur de la radio contact FM à Kigali
Augustin Katumba Mwanke fut sans l'ombre d'un doute le plus brillant stratège politique de la République démocratie du Congo (RDC) du début de ce siècle. Il hérita d'un pays démembré et dévasté, peuplé de groupes armés défiant l'autorité du gouvernement central de Kinshasa et parvint à ouvrir la voie du développement pacifique et d'une harmonisation régionale.
Katumba Mwanke réalisa le tour de force de se rapprocher de la Chine tout en préservant les relations avec les bailleurs occidentaux, en dépit d'un nombre croissant de détracteurs. Mais c'est surtout par sa vision claire de la politique nationale et régionale qu'il s'imposa en médiateur actif entre les mouvements de l'est du Congo et Kigali.
Les négociations politiques, avec pour but une relation constructive avec le Rwanda, étaient conduits sous sa direction avec un grand sens diplomatique. En 2009, le processus d'intégration de la plupart des groupes armés a donné au Congo l'opportunité de s'engager dans le développement pacifique de la nation. Ce processus a ouvert la voie aux élections de 2011 et permis d'amorcer une saine collaboration régionale. Cette seconde élection fut en effet l'un des plus beaux hommages qui lui soit rendu, le doigté avec lequel il a piloté les choses après un vote très critiqué est tout à son honneur. Les deux élections présidentielle et législatives, furent entièrement soutenues par les pays frères comme le Rwanda, l'Angola, l'Afrique du Sud, et la population de l'est de la RDC, contrairement aux bailleurs européens qui envisageaient ces élections avec pessimisme.
Crash de Bukavu, le début de la crise
Le crash de février dans lequel Katumba Mwanke perdit la vie, marqua hélas le début d'une nouvelle ère de crise pour la RDC
Une guerre de succession a éclaté autour du fauteuil vide de Katumba. Est-ce ainsi qu'il faut lire le nouveau conflit dans l'est du Congo ? Les prétendants à la succession de Katumba Mwanke ont-ils cherché à montrer au président Kabila qu'ils étaient prêts pour le poste ?
Katumba Mwanke n'aurait probablement pas débuté une nouvelle guerre en sachant qu'il ne la gagnerait pas, un conflit qui plongerait à nouveau le pays dans le cauchemar plutôt que le développement. Ce second mandat du président Kabila devait apporter solutions et progrès, ouvrant la voie à l'essor imminent de la société congolaise.
L'entourage de Kabila a tiré la mauvaise carte en optant pour un conflit qui, dans tous les cas de figures, aura un impact désastreux sur sa présidence. Le rôle des donneurs de leçons occidentaux qui ont soutenu la RDC pour la réorganisation et l'entraînement de l'armée congolaise ne doit pas être minimisé, tant ils semblent aujourd'hui partie prenante de ce désastre qui s'abat sur la RDC.
Atmosphère de haine
Il aura fallu 10 ans au leadership congolais pour construire une atmosphère de haine et de peur pour les populations de l'est. Une atmosphère au sein de laquelle certains ressortissants congolais furent traités comme des citoyens de seconde zone, et vilipendés comme agents rwandais, suspectés comme d'habitude d'être à l'origine des problèmes de la RDC. Une atmosphère construite par un discours de haine encouragé par le leadership de Kinshasa.
Cette escalade pris fin quand en 2009, le Rwanda et la RDC décidèrent de faire un pas décisif vers une relation pacifiée et constructive. Pour montrer à quel point le Rwanda était prêt à contribuer à cet effort, Kigali pris à bras le corps la question du CNDP (Congrès national pour la défense du peuple, une rébellion qui sévissait alors dans l'Est du Congo), ce qui permit à Kabila d'intégrer ses opposants. Kinshasa, de son côté, autorisa la lutte contre les FDLR comme si le mal causé par les génocidaires n'affectait que le Rwanda.
À nouveau il semble que Kinshasa ait manqué de jugement quant aux causes profondes des problèmes dans l'Est. Kabila et son entourage n'ont probablement jamais accepté le fait qu'ils avaient été poussés, défaite après défaite, à accepter l'échec militaire, tout comme ils n'ont jamais compris que la misère des populations du Kivu, otages des forces génocidaires, était un désastre national.
Dans les années qui ont suivi les accords, Kinshasa s'est concentré sur la réorganisation de son armée sans les éléments intégrés. Le leadership congolais n'a jamais mit fin à l'atmosphère de haine construite contre les rwandophones et assimilés. La rendant pire encore en développant une aversion tribale contre les Tutsis congolais.
Retour à la case du départ
Trois ans plus tard, nous revoici à la case départ. Kinshasa veut donner une bonne leçon aux Rwandais et prouver à tous que le Congo est de retour, comme au bon vieux temps de Mobutu.
On assiste au même scénario que dans la séquence précédente, à savoir la défaite de la glorieuse armée congolaise, suréquipée, avec des effectifs 10 fois supérieurs en nombre à ceux des rebelles. Qui faut il blâmer ? Avec le soutien habituel des « experts » de l'ONU et leurs rapports qui « fuitent », suivez mon regard : le Rwanda.
Les mutins congolais n'ont pas besoin du Rwanda pour défaire les forces armées congolaises, accuser le Rwanda n'est qu'un prétexte et tout le monde le sait. Les mutins du M23 servent une cause légitime, en dépit de ce que prétendent l'envoyé spécial des États-Unis en RDC et quelques autres. Et tant que les causes profondes ne seront pas prises en compte et traitées par le leadership congolais, ils ne feront que précipiter l'effondrement de Kabila.
Toute solution militaire est suicidaire, une solution politique à la crise est la seule alternative qui vaille. Si Kabila ne comprend pas que la sécurité de toutes les communautés, y compris celle des rwandophones, doit être garantie en priorité et que les FDLR doivent être vus comme un menace pour les populations du Congo oriental, alors, à long terme, Kinshasa perdra les Kivus et probablement davantage. Le président Kabila combat contre son ombre, se tire une balle dans le pied, et crée les conditions de sa propre chute. Et rien ni personne ne pourra recoller les morceaux.
Par Albert Rudatsimburwa
(PDG de Contact FM)
In www.jeuneafrique.com du 13 juillet 2012
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