Crée le 27-12-2012 09H00 | AFRIQUE REDACTION | REDACTEUR EN CHEF : ROGER BONGOS | SITE PANAFRICAIN |ACTUALITE NATIONALE, AFRICAINE ET INTERNATIONALE. Mis à jour le jeudi 27-12-2012 - 18H20 PAR : LE POTENTIEL
« Connaissez-vous le Kivu ? Un drame s'y joue. En ce moment même. Avec déjà des millions de morts et d'autres millions de vies dévastées ». Ce sont les phrases contenues dans l'appel lancé, mardi à partir Paris, par 20 grandes personnalités du monde, toutes nationalités confondues, pour interpeller le monde – l'ONU en premier – pour le drame humanitaire qui s'abat depuis plus d'une décennie sur l'Est de la RDC. Des morts se comptent par millions – cinq millions, selon le département d'Etat américain et plus de six millions pour d'autres sources. Jamais le monde n'a connu pareilles atrocités. Curieusement, la communauté internationale garde toujours son silence, se gênant à condamner ce qui s'apparente clairement à un génocide.
L'échantillon de personnalités réunies autour de la tribune publiée le mardi 25 décembre 2012, le jour de Noël, dans les colonnes du journal français Le Monde, est bien relevé pour passer inaperçu. Vingt personnalités de notoriété mondiale ont porté à voix audible la cause des populations meurtries de l'Est de la République démocratique du Congo. Depuis plus d'une décennie, un drame humanitaire y a élu domicile.
A côté de l'ancien président français, Jacques Chirac, de l'ambassadrice de la Fondation Danielle Mitterrand, Valérie Trierweiler par ailleurs compagne du président François Hollande, du secrétaire général de la Francophonie, Abdou Diouf, et bien d'autres célébrités, un seul Congolais de la RDC s'est associé à la tribune. Il s'agit du très célèbre médecin directeur de l'hôpital général de Panzi dans le Sud-Kivu, le docteur Daniel Mukwege. Il a gagné sa réputation en soignant avec abnégation les femmes violées.
Cet aréopage de personnalités venues de tous les horizons a unanimement appelé le monde, particulièrement l'ONU, à « remplir son mandat » en RDC. Cela pour empêcher le chaos.
Plus de six millions de paisibles citoyens congolais ont péri, victimes d'une guerre injuste, inutile et imposée par deux voisins de l'Est du pays. Six millions de morts ignorés par la communauté internationale. Celle-ci s'obstine à fermer les yeux devant le drame récurrent du Kivu. En deux décennies de conflits, l'instabilité de la partie Est de la RDC a déjà fait plus de victimes que les deux guerres mondiales réunies. Pendant ce temps les grandes puissances se complaisent dans l'expectative, à la manière des gamins médusés. Silence coupable et complice.
Face à l'injustice et devant ce qui s'apparente clairement à un génocide, les signataires de la tribune, reprise dans Le Monde, sont montés au créneau. Ils ont haussé le ton pour qu'enfin justice soit faite en faveur des millions de morts de la RDC. Le génocide congolais est bien là et l'on ne peut plus se voiler la face devant des évidences détaillées dans plusieurs rapports d'experts des Nations unies.
Tout récemment, la diplomatie américaine a reconnu, sans ambages, dans une mise au point adressée à la rédaction du quotidien Le Potentiel, que la guerre dans l'Est de la RDC a déjà fait cinq millions de morts. La comptabilité macabre importe peu. Qu'il s'agisse de 5 ou 6 millions de morts, selon toute vraisemblance, ce chiffre dépasserait déjà les six millions. L'essentiel est que les Etats-Unis, première puissance mondiale, ont franchi le Rubicon en dénonçant enfin les millions de morts de Kivu.
Alors questions : qu'est-ce qui empêche encore les autres puissances à reconnaître le « génocide congolais » ? Y aurait-il des forces obscures qui retarderaient cette reconnaissance ?
Le cri de cœur
Les signataires de la tribune du journal Le Monde abondent également dans ce sens. « Connaissez-vous le Kivu ? Un drame s'y joue. (...) Avec déjà des millions de morts et d'autres millions de vies dévastées. Un drame que la communauté internationale pourrait arrêter. A l'instant. Il lui suffirait de donner l'ordre aux dix-sept mille soldats (en mission pour l'ONU, NDLR) de faire leur métier et de remplir leur mandat », écrivent-ils dans cette tribune.
« Faute d'application réelle de son mandat pour intervenir », les 17000 soldats de la Mission de l'ONU pour la stabilisation en RDC (Monusco) « regardent et constatent ». Ils « attendent une résolution du Conseil de sécurité qui leur permettrait d'agir », regrettent les auteurs.
« L'horreur, ces derniers jours, a franchi un nouveau degré. Des escadrons, dont le groupe baptisé M23, font des incursions à Goma et sèment la terreur dans sa périphérie », déplorent-ils. « Ils ravagent et ils tuent. Et ils violent. Ils violent par centaines de milliers les femmes et les enfants pour terroriser la population », poursuivent-ils.
Les signataires de la tribune entendent voir l'ONU agir sur le terrain pour mettre fin à un conflit qui dure depuis plus d'une décennie. Pour une mission qui compte plus de 17 000 hommes, dotée d'un important budget et de moyens nécessaires pour une action de maintien de paix, il ne peut être retenu des circonstances atténuantes. La requalification du mandat de l'ONU passe pour une urgence afin de laver les troupes onusiennes de l'opprobre qui les couvre.
Deux pays voisins de la RDC, en l'occurrence le Rwanda et l'Ouganda, ont été nommément cités dans le dernier rapport du groupe d'experts des Nations unies pour la RDC, comme principal soutien au M23. Au Conseil de sécurité, où siège le Rwanda comme membre non permanent, l'on hésite à prendre des sanctions exemplaires contre les coupables bien identifiés. Certains membres sont soupçonnés d'avoir facilité au cœur de l'Afrique le pire génocide que le monde n'ait jamais connu.
Par devoir et surtout par respect aux millions de morts du Kivu, justice doit être faite pour la RDC. Et, la première étape est celle de la reconnaissance au niveau de plus hautes instances du monde, spécialement les Nations unies, du génocide commis sur le sol de la RDC. C'est la cause défendue dans la tribune reprise mardi dans le journal Le Monde.
Lire, en encadré l'intégralité de la déclaration des personnalités internationales de haut niveau sur la guerre d'agression du Rwanda au Nord-Kivu avec, en annexe, les noms des signataires.
Encadré
Déclaration des personnalités internationales de haut niveau sur la guerre d'agression du Rwanda au Nord-Kivu
« Au Kivu, on viole et massacre dans le silence »
A l'Est de la République démocratique du Congo (RDC), soit au cœur de l'Afrique, cette région est l'une des plus belles du monde. Autour d'un lac, des cultures montent en terrasses jusqu'au sommet des collines. Eau, soleil, terres fertiles, le Kivu aurait tout pour vivre heureux.
Hélas pour lui, son sous-sol regorge de matières premières. Principalement la cassitérite, un minerai dont on tire l'étain. Mais aussi le coltan, autre minerai recherché. Et bientôt le pétrole, qui vient d'être découvert. Attirées par ces richesses faciles, des bandes de mercenaires et de pillards de toutes sortes écument le territoire depuis des décennies et martyrisent les populations.
De temps en temps, des voix s'élèvent. De temps en temps, le calme revient. Et puis recommence le silence. Et reprennent les viols et les massacres. Pour tenter de limiter ces atrocités, l'ONU a envoyé sur place, en 1999, une force de paix qui compte aujourd'hui dix-sept mille soldats. Rappelons que ces dix-sept mille casques bleus y sont au nom de la communauté internationale, c'est-à-dire en notre nom.
Mais, faute d'application réelle de son mandat pour intervenir, ces dix-sept mille soldats regardent et constatent. L'horreur, ces derniers jours, a franchi un nouveau degré. Des escadrons, dont le groupe baptisé M23, font des incursions à Goma et sèment la terreur dans sa périphérie. Ils portent de beaux uniformes et brandissent des armes neuves.
D'où viennent-ils ? Ils ravagent et ils tuent. Et ils violent. Ils violent par centaines de milliers les femmes et les enfants pour terroriser la population. Ils violent pour détruire. Ils violent pour arracher à jamais les identités. Et les enfants qu'ils n'ont pas massacrés, ils les enrôlent de force.
Et, pendant ce temps-là, les dix-sept mille soldats de la Mission de l'ONU pour la stabilisation en RDC (Monusco) attendent une résolution du Conseil de sécurité qui leur permettrait d'agir. Connaissez-vous le Kivu ? Un drame s'y joue. En ce moment même. Avec déjà des millions de morts et d'autres millions de vies dévastées.
Un drame que la communauté internationale pourrait arrêter. A l'instant. Il lui suffirait de donner l'ordre aux dix-sept mille soldats de faire leur métier et de remplir leur mandat. Leur métier de soldat. Et leur mission de garantir la paix et la dignité de l'espèce humaine.
Signataires
1. Muhammad Ali, Afro-américain, ancien champion du monde toutes catégories de boxe. Fondateur du Muhammad Ali Center ;
2. Valérie Trierweiler, épouse du président de la République française et ambassadrice de la Fondation Danielle Mitterrand.
3. Jacques Chirac, ancien président de la République française
4. Abdou Diouf, ancien président de la République du Sénégal et secrétaire général de la Francophonie ;
5. Federico Mayor, ancien Directeur général de l'Unesco ;
6. Robert Badinter, ancien président du Conseil constitutionnel de France
7. Yamina Benguigui, ministre française de la Francophonie ;
8. Rosario Dawson, comédienne ;
9. Jonathan Demme, réalisateur ;
10. Eve Ensler, auteur et créatrice des V-Day ;
11. Leymah Gbowee, prix Nobel de la paix 2011 ;
12. Stéphane Hessel, ancien ambassadeur de France ;
13. Angélique Kidjo, chanteuse ;
14. Claude Lanzmann, écrivain et réalisateur ;
15. Denis Mukwege, Congolais, gynécologue et prix des droits de l'Homme des Nations unies ;
16. Thandie Newton, comédienne;
17. Erik Orsenna, écrivain ;
18. Atiq Rabini, écrivain ;
19. Jean Christophe Ruffin, écrivain ;
20. Mahamat Saleh Haroun, réalisateur ;
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